Thèse soutenue

One, two, three, Viva l'Algérie ! : allers-retours identitaires des supporters français de parents algériens

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Auteur / Autrice : Nabila Touil
Direction : Claire Lévy-Vroelant
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sociologie
Date : Soutenance le 11/02/2019
Etablissement(s) : Paris 8
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences sociales (Saint-Denis, Seine-Saint-Denis ; 2000-....)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Laboratoire sur l'architecture, la ville, l'urbanisme et l'environnement
Jury : Président / Présidente : Rémy Ponton
Examinateurs / Examinatrices : Yvan Gastaut, Evelyne Ribert
Rapporteurs / Rapporteuses : France Guérin-Pace, Stéphane Beaud

Résumé

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Les travaux menés en France enrichissent la recherche sur la thématique du football et de l’immigration, avec un investissement du questionnement autour de l’expression et de la revendication identitaire. Cet objet est investi depuis deux décennies, notamment par les historiens puis par les sociologues. Il s’agit le plus souvent de questionner le rôle du football dans l’exacerbation des identités, mais aussi des couleurs endossées par les joueurs d’origine immigrée pour véhiculer ou promouvoir les sentiments d’appartenance. Nous nous sommes intéressés à la dynamique et à la créativité identitaire chez les Français de parents algériens dans leurs pratiques de « supporters à distance » lors des compétitions footballistiques. Notre travail interroge les processus d’identification et observe des « allers-retours » identitaires. Par cette expression est désigné un processus rien moins que linéraire, qui varie selon les conjonctures et les évènements survenant dans la vie des individus. Il s’agit de comprendre les symboles et les formes mobilisés dans les énoncés et les discours de nos enquêtés, qui enclenchent le mécanisme de déclinaison ou de déclaration de telle et/ou telle identité. Notre thèse montre que les « allers-retours » identitaires, particulièrement sensibles aux conjonctures successives, sont lestés du poids de l’histoire franco-algérienne qui traverse l’histoire de l’immigration en provenance de l’ancienne colonie. La représentation de la guerre d’Algérie est omniprésente ; mémoire de la colonisation et mémoire de l’immigration se croisent, produisant des représentations influentes. Le passé de l’Algérie et de la France est l’un des contextes où les identifications sont mises en scènes, se confrontent et se négocient entre persistance de certaines représentations coloniales, conflits de légitimité, voire de loyauté, et quête de reconnaissance. L’incertitude des statuts, des rôles, des identités sur fond de mémoires à la fois refoulées et/ou stéréotypées rongent comme une gangrène. Notre approche n’est pas éloignée de celle qu’entraîne la notion de « droit à la différence » popularisée dans les années 1980 après la mobilisation des descendants de l’immigration maghrébine. Mais nous rectifions le « droit à la différence » en l’élargissant à l’idée d’une propension à une identité multiple. Partant de l’idée que l’identité est d’abord un récit de soi, une convocation de la subjectivité qui s’exprime comme « identité narrative » au sens de Paul Ricœur, nous analysons les significations que les supporters donnent, en tant qu’acteurs, à leur pratique de supportérisme. Ces significations sont plurielles, les acteurs font appel au répertoire identitaire qu’il leur est loisible de convoquer, ce qui donne une succession de définitions dont le déroulé dépend des conjonctures. Selon l’approche interactionniste, l’identité est le résultat des interactions sociales qui prennent place au cours d’actions situées. Notre recherche se déroule dans plusieurs espaces-temps : celui de la rue et des espaces de rencontre à l’occasion d’évènements footballistiques ; celui de la page facebook de l’équipe algérienne ; celui de correspondances par email, sur le temps long, avec des supporters qui ont accepté ce mode de communication. L’analyse des énoncés et des trajectoires d’identification constitue le cœur de notre recherche, permettant de saisir à quel point les constructions identitaires sont labiles et dynamique, et combien le besoin de communion et de reconnaissance est puissant parmi ces jeunes « issus de l’immigration ».