Thèse soutenue

Déshabiller la danse : Les scènes de café-concert et de music-hall (Paris, 1864-1908)

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Auteur / Autrice : Camille Paillet
Direction : Marina Nordera
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Arts vivants dominante danse
Date : Soutenance le 21/06/2019
Etablissement(s) : Université Côte d'Azur (ComUE)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sociétés, humanités, arts et lettres (Nice ; 2016-....)
Jury : Président / Présidente : Hélène Marquié
Examinateurs / Examinatrices : Hélène Marquié, Roland Huesca, Felicia Mc Carren, Romain Piana
Rapporteurs / Rapporteuses : Hélène Marquié, Roland Huesca

Résumé

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À mi-chemin entre un café, un jardin d’agrément, un bal et une scène théâtrale, les cafés-concerts et les music-halls représentent les divertissements les plus importants du XIXe siècle. Espaces spectaculaires qui accueillent des sociabilités hétérogènes et qui combinent une double fonction artistique et festive, l’identité socioculturelle de ces nouveaux loisirs s’est d’abord élaborée par opposition au statut du lieu d’art. Le postulat de la rareté des répertoires et des artistes issus des cafés-concerts et des music-halls dans l’historiographie des arts scéniques, et dans la transmission des savoirs en danse, nous a conduits à enquêter sur les raisons et les enjeux de cette mise à l’écart. « Lieux dangereux et vulgaires », « spectacles immoraux », « artistes insipides », sont les expressions symptomatiques d’une perception négative fondée sur un ensemble idéologique qui concourt à dessiner les contours d’une illégitimité culturelle. Une première étape de la recherche vise à analyser les principes de distinction sociale et de hiérarchisation artistique en œuvre dans le processus de délégitimation des cafés-concerts et des music-halls, en puisant dans les sources produites par les institutions en charge du contrôle des spectacles au XIXe siècle. Catégorisés en tant qu’objets populaires, les arguments déployés par les instances administratives et la police des théâtres révèlent en premier lieu le fondement d’une idéologie de classe, focalisée sur les origines prétendues populaires de ces divertissements. Entre le Second Empire et la Troisième République, l’histoire des cafés-concerts et des music-halls est traversée par un phénomène de féminisation qui bouleverse les pratiques et les représentations associées à ces espaces et participe à resémantiser leurs premières attributions sociales et symboliques. La seconde phase de ce travail s’intéresse aux effets d’un processus qui interagit sur les plans socioculturel, professionnel et symbolique par une présence féminine érotisée et qui tend à bâtir la catégorie du divertissement comme appartenant au genre féminin. Afin d’interroger les échanges entre altérités féminines et corporéités populaires sur les scènes des cafés-concerts et des music-halls durant la seconde moitié du XIXe siècle, la thèse mobilise deux catégories d’artistes féminines — les effeuilleuses et les danseuses de chahut-cancan — réunies autour d’un geste scénique et érotique commun : le déshabillage. L’étude de ce geste ouvre un troisième champ de questionnements sur les rapports entre l’érotique et l’illégitime dans les pratiques professionnelles de femmes qui exercent un métier artistique au sein d’un lieu spectaculaire à la fois déconsidéré et hautement érotisé. À travers les différentes étapes qui jalonnent cette recherche, la réflexion cherche à rendre compte de l’impact du déshabillage érotique sur la sensibilité d’une époque, sur le statut social des femmes, mais également sur les mouvements internes de professionnalisation des artistes de café-concert et de music-hall au XIXe siècle, et plus globalement, sur l’héritage historiographique de ces divertissements.