Thèse soutenue

Genre et tradition : circulation, réception et appropriation de la « question féminine » dans la culture balkanique slavophone au XXème siècle

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Auteur / Autrice : Tanya Karagyozova
Direction : Svetla Moussakova
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire culturelle
Date : Soutenance le 09/12/2015
Etablissement(s) : Sorbonne Paris Cité
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Études anglophones, germanophones et européennes (2009-2019 ; Paris)
Partenaire(s) de recherche : établissement de préparation : Université de la Sorbonne Nouvelle (Paris ; 1970-....)
Laboratoire : Équipe de recherche Intégration dans l'espace européen (Paris)
Jury : Président / Présidente : Lidiâ Mihova
Examinateurs / Examinatrices : Svetla Moussakova, Lidiâ Mihova, Krasimira Daskalova, Michèle Riot-Sarcey

Résumé

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A l’échelle de l’Histoire des Balkans du XXème siècle, la percée des femmes dans l’économie rémunérée, dans l’enseignement supérieur et l’activisme féministe se sera concrétisée de manière toute aussi remarquable qu’ailleurs en Europe. Cependant, dans le contexte des Balkans slavophones en général et en Bulgarie en particulier, les conditions concrètes de cette évolution se négocient selon les critères inéluctables d’un rapport singulier à la tradition. Nous proposons, tout d’abord, de situer ce contexte (rarement abordé à travers l’histoire des femmes et encore moins dans une perspective féministe) à partir d’un regard ethnographique sur la culture traditionnelle et la spécificité des interdits pesant sur le corps et la parole des femmes. Nous prolongerons notre observation à travers la modernité balkanique qui induit de profondes transformations des notions de culture, de nation et de minorités ethniques. Nous les mettrons en perspective avec la réponse de l’État-nation moderne à la « question féminine » [Zenski vapros / Женски въпрос] qui, de fait, valida constitutionnellement nombre de logiques d’exclusion. Il s’agira également de resituer les mouvements féministes de la première heure en mettant l’accent sur ceux s’étant associés aux luttes ouvrières et la difficulté du mouvement socialiste féminin [zhensko sotsialistichesko dvizhenie / женско социалистическо движение] de résister à l’assimilation. Dans la continuité de notre réflexion, nous interrogerons le discours égalitariste de l’époque communiste, en privilégiant un cadrage sur les années 1970-1980. Afin de mettre en lumière les conditions concrètes de l’émancipation dans la vie privée (avortement, divorce, rapports de sexe), nous explorons un corpus homogène articulé autour de l’unique revue féministe éditée par les successeurs du mouvement socialiste féminin du début du siècle. Ce retour sur l’histoire mouvementée de la seconde moitié du XXème siècle, effectué sous le prisme du genre, évoque ce qui dérange le plus dans l’idéologie des régimes communistes, mais aussi dans le discours marxiste, tel qu’interprété localement. Cette thèse révèle les mécanismes à l’œuvre lors de la réception et l’appropriation de la réponse marxiste à la « question féminine » sur le terrain, en insistant sur les résonances singulières avec le discours traditionaliste d’époques antérieures; tel que nous le retraçons dans le folklore, dans la littérature classique de la Renaissance balkanique à la croisée d'influences européennes et orientales, mais aussi dans le sillage du processus d’européanisation à relier, notamment, aux circulations éditoriales. Tout au long de cette recherche, nous plaçons au centre l’analyse générale de la « question féminine » comme discours, tout en questionnant la longévité des résistances face à ses ambitions émancipatrices et ceci jusqu’à l’époque contemporaine de transition néolibérale. En effet, aborder les remaniements des discours d’émancipation revient à poser la question du renouvellement des modèles de féminité, à (re)penser leur réception et à réfléchir au rôle des femmes dans ces processus et ceci dans une investigation de vaste chronologie, de temps long, sans aucunement prétendre à l’exhaustivité.