Thèse soutenue

Le "tact" du polémiste : du local au mondial, trois œuvres de polémistes au début du XXe siècle (Charles Péguy, Karl Kraus, Lu Xun)

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Auteur / Autrice : Céline Barral
Direction : Catherine Coquio
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Litterature generale et comparee
Date : Soutenance le 02/11/2015
Etablissement(s) : Paris 8
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Pratiques et théories du sens (Saint-Denis, Seine-Saint-Denis ; 1992-....)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Littérature, Histoires, Esthétique
Jury : Président / Présidente : Tiphaine Samoyault
Examinateurs / Examinatrices : Catherine Coquio, Jacques-Olivier Bégot, Yinde Zhang
Rapporteurs / Rapporteuses : Pierre-Yves Boissau, Jean-Louis Jeannelle

Résumé

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À l’ère de la spécialisation, des sciences sociales et de l’autonomisation de la littérature, la langue du polémiste s’attaque à « l’universel reportage » (Mallarmé). Les Cahiers de la quinzaine de Charles Péguy (1900-1914), la revue Die Fackel (le Flambeau) de Karl Kraus (1899-1936) et les « écrits divers » (zawen) des années 1920-1930 de Lu Xun représentent trois tentatives pour situer l’œuvre littéraire dans une frange critique de l’actualité, à distance du journalisme et du feuilleton. Le texte du polémiste est un discours sans autorisation sur les phénomènes politiques, sociaux et culturels de son temps. Il exalte un « je » souverain, qui porte le masque de Timon, de Thersite ou de Xing Tian, le combattant acéphale de la mythologie chinoise. Rejeté hors de la littérature ou du champ de la création par ses contemporains et par l’histoire littéraire, le polémiste perturbe les catégories génériques et l’idée même d’œuvre. La thèse propose de réinterroger le statut de l’œuvre polémique dans la littérature. Elle examine les différents lieux et temps d’inscription propres au polémiste (discours social, revue, recueil, œuvre complète, anthologie…) et tente de poser les jalons d’une poétique de la polémique. La constitution d’une telle poétique passe par la ressaisie des interdits relatifs à la polémique. Au polémiste, il est reproché de manquer de tact. La thèse inverse ce reproche en édifiant la catégorie paradoxale de « tact du polémiste », à partir de la pensée critique allemande en particulier (Walter Benjamin, Theodor W. Adorno). La parrêsia du polémiste n’est pas tant le tout-dire, qu’une certaine optique, un art de l’exagération et de la déformation : une souveraineté abusive sur le détail. La thèse ouvre sur l’enjeu de la mémoire de ces œuvres : les textes de polémistes deviennent des sismographes de la littérature mondiale, eux qui ne circulent pas facilement au-delà des frontières nationales et n’ont pas la lisibilité des fictions.