Thèse soutenue

Vers une pédagogie des temps faibles : étude sur les processus d'autonomisation en classe maternelle dans le cadre des espaces-temps intersticiels

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Auteur / Autrice : Raphaelle Raab
Direction : Philippe Meirieu
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences de l'éducation
Date : Soutenance le 09/07/2015
Etablissement(s) : Lyon 2
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de l'éducation, psychologie, information et communication (Lyon)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : ECP - Éducation, Cultures, Politiques (Lyon ; 2011-....)
Jury : Président / Présidente : Philippe Foray
Examinateurs / Examinatrices : Lucie Mottier Lopez, Nadja Maria Acioly-Régnier
Rapporteurs / Rapporteuses : Olivier Maulini

Résumé

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Notre thèse étudie les conditions favorables à l’autonomisation scolaire des élèves. L’étude empirique est menée en grande section de maternelle. Dans la plupart des situations de formation, les temps « d'autonomie » sont structurellement inévitables puisque le formateur ne peut être présent pour tous à chaque instant. Nous nous intéressons aux temps de classe au cours desquels l’enseignant n’intervient pas directement, soit parce qu’il n’est pas disponible, soit parce qu’il se retire volontairement de la situation. Nous les appelons temps faibles en raison de cette faible présence de l’enseignant : l’élève doit agir en fonction de ses propres forces, sans l’intervention directe du maître pour réguler l’apprentissage et les comportements. Il appert que les élèves n’y sont pas naturellement autonomes : laissées au hasard de capacités acquises hors l’école, les activités dites « en autonomie » contribuent à creuser les écarts entre les élèves face aux savoirs qui leurs sont proposés. L’autonomie ferait partie de ces comportements implicitement attendus et « davantage supposés ou requis par les enseignants que construits dans, avec et par l’école ». Comment penser le processus d’autonomisation scolaire et comment l’opérationnaliser en contexte ordinaire de classe ? Nous cherchons les outils, les leviers, les interactions et les dispositifs qui permettraient aux élèves, – à tous les élèves – de profiter des temps faibles au bénéfice de leurs apprentissages. Les données sont recueillies dans 14 classes sur 117 demi-journées d’observation directe, puis traitées à l’aide de l’analyse par les catégories conceptualisantes (Paillé, 2012). Dans la perspective (socio)constructiviste de l’apprentissage, pour construire un savoir nouveau, l’élève doit rencontrer un obstacle dans la réalisation de la tâche, l’apprentissage résultant du dépassement de celui-ci. Nous relevons des comportements différenciés face à l’obstacle dans les ateliers en autonomie : certains élèves entrent dans des conduites d’évitement, refusant d’affronter cet obstacle, s’en trouvant détournés en amont ou bien le contournant. D’autres, au contraire, entrent dans des conduites de ressources pour le dépasser et construire de nouvelles connaissances. En cours d’étude apparaissent des dynamiques remarquables : certains élèves, d’habitude « évitants », rejoignent ou se maintiennent parfois dans des conduites de ressources. L’étude de ces « exceptions notables » fait émerger les conditions favorables ayant permis leur dynamique particulière en termes d’outils, d’activités, d’interactions et de dispositifs. Ce qui aura pu fonctionner au bénéfice des exceptions notables pourrait être exploité comme levier pédagogique durable au bénéfice de tous. Ces conditions deviennent alors supposées favorables et sont réinvesties dans des dispositifs expérimentaux afin d’observer si elles produisent les effets attendus, dans quelle mesure et selon quelles limites (analyse des dispositifs expérimentaux par une adaptation du modèle systémique d’Engeström, 1987). Il apparait clairement que le processus d’autonomisation, en contexte scolaire de classe hétérogène et nombreuse, s’observe et se construit de façon privilégiée dans les temps faibles de la structuration pédagogique et leur articulation avec les temps forts, notamment les retours collectifs sur ateliers. Une pédagogie des temps faibles supposerait que soit accordé à ceux-ci un véritable statut pédagogique, en tant qu’étape et instrument essentiels au processus d’autonomisation scolaire. Une telle pédagogie supposerait également d’organiser avec soin les interventions de l’enseignant en mode opératoire indirect, au travers d’un dispositif de classe qui le relaie et dont les différentes dispositions (outils, règles, activités, interactions) peuvent « être appropriées » par l’élève comme instruments psychologiques pour agir sur lui-même, en première personne. .....