Ancrage politique et social des dispositifs socionumériques de communication dans la société russe postsoviétique
Auteur / Autrice : | Alexander Kondratov |
Direction : | Bertrand Cabedoche |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences de l'Information et de la Communication |
Date : | Soutenance le 06/11/2015 |
Etablissement(s) : | Université Grenoble Alpes (ComUE) |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale langues, littératures et sciences humaines (Grenoble, Isère, France ; 1991-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Groupe de recherche sur les enjeux de la communication (Grenoble, Isère, France ; 1978-....) |
Jury : | Président / Présidente : Philippe Bouquillion |
Examinateurs / Examinatrices : Bernard Miège | |
Rapporteur / Rapporteuse : Philippe Bouquillion, Iliya Kiriya |
Mots clés
Résumé
Ce travail de thèse questionne la place que les dispositifs numériques d'information et de communication occupent dans la reconfiguration de l'espace public (Habermas, 1991) contemporaine post-soviétique. Il étudie également l'émergence, l'inscription sociale et l'usage politique des espaces participatifs du web - tels que les blogs, les forums ou les réseaux sociaux, au sein de cette société. Aussi, nous explorons le processus de la médiation, tel qu'il s'exerce à l'extérieur de la médiatisation classique dans la sphère publique nationale post-soviétique. Après avoir appliqué les différentes méthodes d'analyse des réseaux (cartographie, entretiens semi-directifs, observation participative), nous pouvons constater qu'actuellement en Russie contemporaine nous observons l'éclatement de l'espace public unique et le retour au modèle de double espace public: officiel « dominant », constitué en grande partie des médias audio-visuels, la presse écrite nationale et des partis politiques institutionnalisés et l'espace « parallèle » constitué des « nouveaux » médias numériques (Kiriya, 2012). Ces tendances nous montrent la persistance des formes et des configurations de l'espace public dans la société malgré les changements économiques et sociaux. Dans le contexte post-soviétique, les « nouveaux » médias numérisés soutiennent à la fracture sociale et politique dans la société et épargnent l'espace public officiel des discours et des débats oppositionnels. En même temps, ces dispositifs contribuent à l'apparition des nouveaux acteurs des débats et de la production de l'information, et au maintien de la diversité des opinions. De ca fait, les dispositifs numériques de communication peuvent être insérés dans les espaces sociaux différents et d'accompagner les pratiques de libération et de domination en même temps. Notre travail montre que le déploiement des réseaux socionumériques et des médias numériques post-soviétiques participe aux évolutions plus générales de la société post-soviétique. Ils stabilisent et rendent visible la configuration des acteurs des espaces sociaux préexistants. L'étude de l'ancrage politique des réseaux socionumériques et des médias dans l'espace public officiel nous conduit à adopter une vision critique de la théorie « positiviste » des réseaux socionumériques en tant qu'outils de délibération et de débats argumentatifs. Ainsi, l'espace numérique post-soviétique est devenu une prolongation de l'espace public officiel de domination tout en assurant l'appropriation des discours étatiques propagandistes et leur pénétration dans l'espace privé. Ce travail montre que l'ancrage social (Miège, 2007) et politique de ces outils dans la société Russe est plutôt conservatif et ne contribue à la libération et démocratisation de la société. Bien au contraire – ces outils sont utilisés pour reproduire l'ordre politique dominant, diviser l'espace public etc. Les débats et les mobilisations sur le net ont faiblement contribué à l'émancipation et aux changements sociaux. Insérés dans les champs sociaux nationaux existants, ces médias numériques ont incité à la délibération et la maîtrise de la violence. En même temps, ils pouvaient être mobilisés par les acteurs dominants afin d'asseoir leur domination et leur violence. Dans le contexte post-soviétique, les technologies numériques ont contribué au déclin de la mobilisation politique d'opposition, renforçant l'isolement des acteurs politiques, exclus de l'espace public, et un contrôle social profitable aux autorités russes actuelles. L'expression « spontanée » de mouvements sociaux s'effectue selon les formes protestataires historiquement préexistantes (Bertrand Cabedoche, 2010) et notre étude du cas post-soviétique le confirme pleinement.