Thèse soutenue

Le culte des saints en Normandie (IXe-XIIe siècle) : Enjeux de pouvoir dans les établissements bénédictins du diocèse de Rouen

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Auteur / Autrice : Lucile Trân-Duc
Direction : Véronique GazeauClaude Lorren
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire et Archéologie des Mondes Anciens et Médiévaux
Date : Soutenance en 2015
Etablissement(s) : Caen
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Normandie Humanités (Mont-Saint-Aignan, Seine-Maritime)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre Michel de Boüard - Centre de recherches archéologiques et historiques anciennes et médiévales (Caen ; 1959-....)
Jury : Président / Présidente : Annick Peters-Custot
Examinateurs / Examinatrices : Véronique Gazeau, Claude Lorren, Annick Peters-Custot, Edina Bozóky, Patrick Henriet, David Bates
Rapporteur / Rapporteuse : Edina Bozóky, Patrick Henriet

Résumé

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Au IXe siècle, la vallée de la Seine est touchée de plein fouet par les invasions scandinaves. Les textes hagiographiques composés a posteriori, entre le Xe et le XIIe siècle, s'attardent longuement sur la fuite des religieux, accompagnés de leurs plus précieuses reliques, loin de la zone de troubles. À en croire ces sources, cela n'est que temporaire : nombre de restes saints regagnent la région rouennaise une fois ces événements passés, sans jamais avoir été perdus de vue ni divisés. D'autres, laissés sur place dans la tourmente, sont miraculeusement mis au jour au retour des religieux. Par conséquent, la rupture dans la pratique des cultes occasionnée par les invasions scandinaves ne serait que passagère. C'est précisément ce topos que la thèse se propose d'examiner. Il ressort en effet clairement de l'ensemble de la documentation que, lors de leur restauration, les monastères du diocèse de Rouen sont dépourvus de reliques. Aussi assiste-t-on, dès le Xe siècle, à un vaste mouvement de quête de restes saints. Celui-ci revêt plusieurs formes : restitutions, inventions ex nihilo, mise à profit des circuits d'échanges, de l'évolution du patrimoine des communautés monastiques, des réseaux de confraternité, des liens d'amicitia, etc. Si les abbayes sont autant soucieuses de reconstituer et d'enrichir leur trésor de reliques, c'est que la mise en valeur de certaines d'entre elles permet à quelques établissements de s'imposer comme sanctuaires. Ces entreprises connaissent des fortunes variées. Elles croisent également les intérêts des grands de la principauté normande implantés dans le diocèse de Rouen qui s'illustrent par une « politique de la sainteté », la manipulation du sacré participant pleinement à l'exercice du pouvoir princier. L'action des comtes de Rouen puis des ducs de Normandie est la mieux documentée. L'usage des reliques leur permet de s'intégrer dans les cadres pré-existants, de sacraliser leur pouvoir lorsque celui-ci est en construction ou se trouve fragilisé. Il accompagne également la construction de l'espace sur lequel s'exerce leur autorité. Cette « politique de la sainteté » n'est pas le privilège des seuls ducs : l'aristocratie du duché se place, elle aussi, sous la protection de dévotions particulières, recourt au sacré qui soutient le double processus de patrimonialisation des honneurs et de territorialisation du pouvoir auquel on assiste dans la principauté normande aux XIe-XIIe siècles.