L' emploi de la première personne de la poésie d'Horace : enquête sur l'écriture autobiographique et la fiction
Auteur / Autrice : | Sihem Sakouhi |
Direction : | Gérard Freyburger |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences de l'Antiquité |
Date : | Soutenance en 2010 |
Etablissement(s) : | Strasbourg |
Mots clés
Résumé
L’enjeu de notre travail n’était pas tant, en menant une enquête sur l’écriture autobiographique dans la poésie d’Horace, de connaître la vie de ce dernier à travers son œuvre que de scruter ses rhétoriques et les stratégies de son autoreprésentation. Lorsqu’il compose ses œuvres poétiques, une seule et même préoccupation traverse l’esprit de notre poète depuis les Épodes jusqu’au quatrième livre des Odes, en passant par Épîtres : effleurer la possibilité autobiographique pour mieux y renoncer. Horace se fait une idée plus élevée sur l’acte de l’écriture qu’il investit de finalités esthétique, rhétorique, éthique voire thérapeutique. Il ne soucie guère de livrer le détail intime dans toute sa sincérité et son exactitude ni d’écrire en permanence comme dans un récit autobiographique. Il cherche au contraire à fictionnaliser sa figure finale, à soumettre son personnage au jeu de l’écriture et aux besoins de chaque pièce, à se former et se transformer en exploitant les ressources du langage. Dans les œuvres lyriques, à la voix du poète privé attaché à ses souvenirs et à ses sentiments amoureux et amicaux succède celle du poète officiel inquiet pour le sort de Rome et du poète génie fier de son talent littéraire. Mais, dans l’expérience du je lyrique, il y a constamment un jeu sur les exigences esthétiques héritées des lyriques canoniques de la Grèce archaïque et classique. Avec les Épîtres, notamment, l’écriture autobiographique coïncide avec le moment fort du souci de soi. La lettre se fait l’écho de l’inquiétude de l’être qui cherche le point fixe et l’équilibre, et pour son âme et pour son corps. Mais l’écriture de soi, si elle se charge d’abord d’une fonction informative intrinsèque, se présente aussi comme un exercice spirituel. Elle relève autrement dit, pour suivre Michel Foucault dans « L’écriture de soi », du travail de soi sur soi et de l’ascèse scripturale. Les Satires, enfin, immortalisent la vie d’Horace dans la société romaine et marquent le début de ses relations avec Mécène et Auguste. Leur affinité avec le monde du théâtre lui permet cependant de porter, à la manière de l’orator et du rhetor, un ou plusieurs masques, afin de gérer d’éventuelles tensions sociopolitiques et de transmettre l’idée qu’il se fait de lui-même ou qu’il veut que le public se fasse de lui-même.