Thèse soutenue

Bases neurales des hallucinations psychosensorielles dans la schizophrénie : de la physiopathologie aux traitements

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Auteur / Autrice : Renaud Jardri
Direction : Delphine Pins
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Neurosciences
Date : Soutenance en 2009
Etablissement(s) : Lille 2

Résumé

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L’hallucination se définit communément comme une perception ou une sensation survenant alors qu’aucune stimulation externe ou interne n’affecte les terminaisons nerveuses. Cette fausse perception doit être distinguée des illusions, perceptions déformées d’un objet réel, ou de l’hallucinose, critiquée par le sujet qui en fait l’expérience. Ce phénomène hallucinatoire peut survenir dans de nombreuses situations physiologiques ou pathologiques, même s’il est retrouvé présent chez plus de 70% des patients avec schizophrénie. L’avènement de la neuro-imagerie fonctionnelle a notamment permis ces dernières années d’identifier des anomalies structurales et fonctionnelles impliquant les aires du langage chez les sujets souffrant d’hallucinations acoustico-verbales. Par ailleurs, la plupart des modèles cognitifs actuels de ce type d’hallucination postulent l’existence d’une attribution erronée du langage intérieur à un agent extérieur à soi. Cependant, les bases neurales exactes de l’hallucination restent non élucidées et la transposition des modèles actuels au-delà de la modalité auditive n’a pas reçu de validation ferme. Nous avons donc dans un premier temps construit puis validé une procédure expérimentale en IRM fonctionnelle permettant la mise en évidence du réseau cingulo-pariétal impliqué dans la distinction implicite soi/non-soi chez le sujet sain. Les patients souffrant de schizophrénie présentaient lors de la réalisation de cette tâche une plus grande superposition neuronale entre soi et autre, signature neurale de l’ambigüité clinique sur l’origine du stimulus, et ce d’autant plus que leurs symptômes positifs étaient sévères. Ces résultats ont du cependant être nuancés par la mise en évidence d’une dissociation fonctionnelle entre sévérité des hallucinations et trouble de l’agentivité. Ce deuxième résultat va à l’encontre d’une conception de l’hallucination comme résultant uniquement d’un défaut d’attribution à soi. Dans un second temps, nous avons validé une méthode innovante d’analyse en composante indépendante des IRM fonctionnelles de repos chez des patients souffrant d’hallucinations. Cette méthode a permis de cartographier les corrélats neuronaux de l’hallucination, quelle que soit la modalité sensorielle impliquée. Cette méthode a mis en évidence l’implication systématique des cortex sensoriels associatifs lors de l’émergence de ces symptômes. Le guidage sur ces cibles corticales déterminées en IRMf, de thérapie par stimulation magnétique s’est avéré efficace dans le traitement d’hallucinations pharmaco-résistantes non-auditives. Au total, ces travaux ont permis de proposer un modèle intégré de l’hallucination psycho-sensorielle dans la schizophrénie, reposant sur l’activation anarchique d’aires sensorielles associatives et leur modulation par un réseau amodal d’agentivité, responsable du biais d’externalisation (les stimuli autoproduits étant faussement attribués à une source externe).