Thèse soutenue

Le rôle structurant des avancées sur la mer dans la baie de Tôkyô : production et reproduction de l’espace urbain

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Rémi Scoccimarro
Direction : Philippe Pelletier
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Géographie, aménagement et urbanisme
Date : Soutenance en 2007
Etablissement(s) : Lyon 2

Mots clés

FR

Mots clés contrôlés

Résumé

FR  |  
EN

Parmi les terrains immédiatement mobilisables pour les opérations foncières de la période de bulle spéculative foncière au Japon (1985-1991), les vastes espaces gagnés sur la mer (umetatechi) dans la baie de Tôkyô ont été d’autant plus la cible de projets de quartiers d’affaires qu’ils offraient des possibilités très avantageuses par rapport au reste de la ville. À proximité du centre (toshin), la structure particulière de la propriété foncière sur ces terrains a permis leur mise à la disposition immédiate pour les promoteurs publics et privés. De vastes opérations urbaines conçues dans les années 1980 sont mises en chantier au milieu des années 1990, après l’éclatement de la Bulle (1991), dans un contexte foncier passé à la déflation. Parmi les plus imposantes, les opérations Rinkaifukutoshin à Tôkyô, Minato Mirai 21 à Yokohama ou encore Makuhari Shintoshin à Chiba. Notre thèse est d’estimer que cette production d’espaces, de territoires, obéit à une logique économique qui revêt des formes géographiques spécifiques dans un cadre sociologique et culturel original. Selon cette approche, le jeu des acteurs impliqués dans la rénovation du front de mer tôkyôte est moins abordé sous l’angle des modalités opératoires de l’aménagement urbain et davantage sous le prisme de leur fonctionnalité systémique. L’identité de ces acteurs révèle quelques surprises, car les principaux, institutions et entreprises, ne correspondent qu’incomplètement à ceux que l’on rencontre habituellement dans la construction de la ville japonaise. Et pour ceux qui sont habituels, leur combinaison et leur rôle respectif diffèrent en partie de ce qui se passe dans les rénovations occidentales des fronts de mer. Les mégaprojets sur terre-pleins ont été le point de départ de la reconversion urbaine des espaces portuaires des mégapoles japonaises. Nous avons choisi de nous appuyer sur l’étude du plus vaste d’entre eux, le Rinkaifukutoshin. Comment, au delà de son développement chaotique, cette opération urbaine a-t-elle initié une reconversion des terre-pleins du port de Tôkyô ? Dans quelle mesure cette reconversion participe-t-elle aujourd’hui à la réorganisation du cœur de la plus grande ville du monde ? Enfin, que peut-on déduire, en termes de produit urbain, de l’avancée de la ville sur les terre-pleins du port ? Sont-ils une simple reproduction de l’espace urbain sur de nouvelles surfaces ou une surface de production de nouveaux espaces urbains ? Après avoir présenté le cadre du terrain, Tôkyô et sa baie, nous montrerons comment le fonctionnement de la mégapole japonaise, ville globale et tête asiatique de la Triade, permet de comprendre la conception du mégaprojet Rinkaifukutoshin. À travers l’histoire chaotique de l’opération, nous proposons une analyse de cette tentative de production d’espace urbain. Dans un deuxième temps, nous nous intéresserons à la reconversion de la zone interne du port de Tôkyô. Nous montrons qu’elle correspond à une véritable avancée de la ville, sur un modèle adapté à la situation foncière de l’après Bulle et selon des principes issus de l’expérience du Rinkaifukutoshin. Cela nous permet d’expliquer comment la reconversion urbaine des terre-pleins du port joue un rôle de premier plan dans les dynamiques sociodémographiques qui remodèlent actuellement les quartiers centraux de la capitale japonaise, au cœur du phénomène de retour au centre, le toshinkaiki. Enfin nous traitons la question de la nature urbaine de ces aménagements et de l’émergence d’un nouvel espace dans la mégapole : le front de mer, ou plutôt, en glocal-language, le wôtâfuronto. Cela nous conduit à traiter la question de l’avenir des terre-pleins du port de la baie ; face aux nouvelles résistances sur fond de débat environnemental, mais surtout face au maintien d’un système de production, et même de surproduction, d’espaces à Tôkyô.