Thèse soutenue

Les abandonnés de la République : l'enfance et le devenir des pupilles de l'Assistance publique de la Seine placés en famille d'accueil (1874-1939)

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Auteur / Autrice : Ivan Jablonka
Direction : Jean-Noël Luc
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire
Date : Soutenance en 2004
Etablissement(s) : Paris 4

Résumé

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Sous la Troisième République, l'action de l'Assistance publique est guidée par trois principes : l'agrarisme, le solidarisme et le jacobinisme. En transférant à la campagne les enfants abandonnés dans les villes, celle-ci s'efforce de régénérer physiquement et moralement des êtres déchus. Le placement familial rural est un succès dans la mesure où les nourriciers et les enfants réussissent à créer une parenté nouvelle. Malgré les préjugés et les marqueurs sociaux qui les stigmatisent, les pupilles de l'État vivent à peu près dans les mêmes conditions que les enfants du cru. Cependant, la fin des études et le placement à gages, dès l'âge de treize ans, inaugurent pour eux une période très difficile. Astreints à un travail pénible dans les fermes, ils sont en butte aux humiliations et aux violences. À vingt ans, ils sont moins grands en taille que les enfants de famille. Après la majorité, les orientations professionnelles que l'administration leur a imposées les cantonnent, dans la moitié des cas, à la domesticité agricole et à l'indigence. Entre 1874 et 1914, l'Assistance publique républicaine réussit à réduire l'énorme mortalité infantile et le fort analphabétisme qui frappait les enfants abandonnés ; mais, à partir de la Première Guerre mondiale, son ambition s'étiole et les pupilles ne profitent pas de la relative démocratisation à l'œuvre dans la société française. Au final, l'utopie républicaine a eu pour effet de fixer à la terre, sans les émanciper, les enfants dépourvus de famille.