Thèse soutenue

L'inconduite arraisonnée : enfermement à Ervadi-Dargah (Tamilnad)

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Auteur / Autrice : Laure Manicom
Direction : Francis Zimmermann
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Ethnologie et anthropologie sociale
Date : Soutenance en 2002
Etablissement(s) : Paris, EHESS

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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La thèse ne souligne pas une prédisposition culturelle mais rend compte d'une situation dont l'exception garde de toute généralisation, produit mouvant et atypique de la société sud indienne, précipité d'histoire régionale et coloniale, à la croisée des cultures musulmane et hindoue. L'enquête ethnographique prit pour objet un phénomène récent - aujourd'hui disparu - dont on ne pouvait augurer la stabiblité ni l'avenir : le développement ces quinze dernières années d'institutions privées de détention illicite à Ervadi (Tamil Nadu, district de Ramanathapuram). Leurs pensionnaires y sont conduits par la force, enchaînés deux par deux pendant un temps indéfini dont seul est maître celui qui décide de l'admission - un proche. Il s'agit de comprendre le contexte qui rend possible et légitime la violation des droits fondamentaux des personnes mises à l'écart - la malnutrition, les conditions sanitaires précaires, les sévices corporels, parfois, entraînent la mort. J'ai cherché à décrire le processus d'institutionnalisation des douze établissements dénombrés comptant au moment de l'enquête 493 pensionnaires. Quels sont les facteurs qui encouragent une forme de regroupement inédite au pays tamoul - certains conjoncturels, d'autres structurels? On observe leur concentration autour de l'enclos qui cerne le dargah, la tombe d'un saint musulman. La multiplication de ces entreprises va de pair avec sa fraîche renommée et la politique de développement mise récemment en oeuvre par son comité: on écrit une histoire qui atteste les vertues thérapeutiques du lieu en même temps que l'authenticité des héritiers. Il convient d'analyser les versions de l'histoire locale élaborées par les différentes communautés : les indous, premiers autochtones, les musulmans aux communautés hétérogènes se scindant en musulmans étrangers et natifs. Il s'agit, en outre, de démêler le réseaux d'influences et de subordinations locales, l'histoire qui les sous-tend faisant des représentants de la loi et de l'ordre, pourtant postés sur place, de souriantes potiches. On assiste à une extension de facto de l'immunité du dargah hors de ses murs. Ces établissements dénommés "Mental Hostels" prospèrent en raison de leur vocation affichée et de la nature du pouvoir - familial- qu'on leur délègue.