L'imaginaire social de la Libération en Bretagne (été 1944 - hiver 1945/1946) : Contribution à une histoire des représentations mentales
Auteur / Autrice : | Luc Capdevila |
Direction : | Jacqueline Sainclivier |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Histoire |
Date : | Soutenance en 1997 |
Etablissement(s) : | Rennes 2 |
Résumé
Il s'agit d'étudier à travers l'analyse des représentations mentales et des comportements collectifs en Bretagne, en 1944-1945, comment une société et des individus passent d'un temps de guerre à un ordre démocratique. D'un point de vue général, les mécanismes culturels observés présentent cette phase de transition sous la forme d'un système complexe : la déprise de la culture de guerre, caractérisée notamment par : la débrutalisation des individus et de la société, indispensable au retour de l'ordre républicain, et l'affaiblissement du sentiment unitaire, nécessaire à la reprise du débat démocratique. Cet essai d'histoire culturelle sur les gens ordinaires à la Libération montre que le tissu national s'est resserré sur une trame patriotique. Les individus se sont solidarisés, par le biais de l'épuration et des pratiques commémoratives, autour du sentiment d'appartenir à une communauté de destin caractérisée par la souffrance et la conviction d'être restée digne face à l'occupant allemand. L'analyse de l'imaginaire social signale que l'élément essentiel de cristallisation du groupe est la germanophobie plus que l'antifascisme. Ainsi, si le régime de Vichy est rejeté en raison de sa politique de collaboration, les reproches du sabordage de la République qui pouvaient légitimement lui être adressés sont rares de la part du commun des citoyens. Si la résistance est très présente et encadre les populations, elle n'a jamais fait l'unanimité, mais si elle inquiétait une grosse partie de l'opinion au début de la libération (été 1944), à la fin de la guerre (printemps 1945) elle est en grande partie acceptée. Au moment de la sortie de guerre, le processus de recomposition a conduit les uns et les autres à s'accorder sur l'essentiel : la volonté de vivre ensemble, dans la pluralité, au sein d'un cadre républicain tolérant ou les idéologies autoritaires d'exclusion et d'affrontement ont perdu provisoirement leur emprise: l'antisémitisme, l'anticommunisme, l'antiparlementarisme. Les regards portés sur les événements qui venaient de se produire sont lucides, l'idée d'un peuple qui a su traverser la guerre en restant digne est un minimum mythique pour structurer une communauté de destin qui, par ailleurs, a acquis la conviction d'appartenir à une puissance en reconstruction